Recapitaliser oui, mais qui paie ?
Imposée par le droit fédéral, la capitalisation de la CPEG peut se faire de deux manières : en la faisant payer par le personnel ou en garantissant prioritairement son financement par la construction, par l’intermédiaire de la CPEG, de logements accessibles à la population.
C’est devant ce choix que le Grand Conseil va se trouver : désengager en partie l’Etat du financement de nos retraites -de nos « salaires pour demain ou salaires différés »- en nous faisant porter l’effort de capitalisation en plus de les exposer aux aléas de la bourse (PL 12188), ou les garantir au travers de la construction d’immeubles (PL 12228) ?
Payer plus pour toucher moins
D’après le Conseil d’Etat, avec son projet, « 82% de la population d’assurés verraient leurs prestations de retraite diminuer »à commencer par les bas salaires et les temps partiels (PL 12188, exposé des motifs, p. 26) La cotisation payée par le personnel serait augmentée de 11% pour des rentes réduites de plus de 4%.
De plus, le PL 12188 fragilise le droit à la retraite anticipée automatique en cas de pénibilité.
Des rentes aléatoires et individualisées
Surtout, le projet du gouvernement impose un changement de système, à savoir le passage de la primauté des prestations comme c’est le cas actuellement, à la primauté des cotisations.
Dans le système actuel, celui de la primauté des prestations, l’objectif de rente est fixé à l’avance. Il l’est aujourd’hui à 60% du salaire assuré pour 40 années de cotisation. Chacune et chacun d’entre nous sait ce qu’il ou elle touchera au moment du départ à la retraite.
Dès lors, la CPEG doit être pilotée de manière à pouvoir atteindre cet objectif, si nécessaire par des apports en capitaux supplémentaires, des cotisations supplémentaires.
Avec le nouveau système, il n’y aurait plus d’objectif de rente : les rentes servies le seraient en fonction des résultats des placements et du « bas de laine » que tout un chacun aura cotisé durant sa carrière avant sa retraite. Personne par contre ne connaîtra à l’avance le montant de ses rentes !
Cotiser plus pour se mettre à l’abri ?
Dès lors, c’est seulement en cotisant davantage qu’on pourra espérer obtenir des rentes décentes et non garanties car soumises aux aléas du taux de conversion et des fluctuations des taux d'intérêts.
C’est pourquoi, le projet du Conseil d’Etat prévoit trois différents plans de prévoyance, impliquant des cotisations différentes qui, de plus, augmenteraient avec l’âge.
Autrement dit, ne pourront espérer des rentes décentes que celles et ceux qui auront pu verser des cotisations majorées. Quant aux autres…
Avec ce PL, la baisse des prestations risquerait d’être plus importante encore que celle qui découlerait de la mise en vigueur de mesures structurelles que le comité de la caisse devrait prendre.
Une fois de plus, ce serait à nous, les assuré-e-s, de passer à la caisse pour -peut-être- nous mettre à l’abri des soubresauts boursiers.
C’est à ce prix que le Conseil d’Etat serait prêt à injecter - en empruntant à la caisse une partie - quelque 4,7 milliards pour capitaliser la CPEG à un rendement bloqué qui ne tient pas compte de la variation des cours possible sur environ 40 ans. L'Etat fait un effort relatif puisqu'il se remboursera en diminuant sa cotisation immédiatement.
C’est un prix inacceptable que la reprise annoncée de l’inflation rendrait encore plus lourd !
Un autre projet de loi est possible
Alternative au projet du Conseil d’Etat, le PL 12228 nous met à l’abri de tout cela.
Ce dernier propose, tout d’abord, que la CPEG reste en primauté des prestations, donc avec un montant des rentes défini à l’avance.
Dès lors, ce n’est pas en fonction des aléas de la bourse que nos retraites seraient versées, mais grâce au pilotage de la caisse par son comité dans un contexte difficile et une conjoncture imprévisible.
Pour que cela devienne possible, le PL 12228 propose que l’Etat cède à la CPEG une partie des terrains constructibles qui lui appartiennent du secteur Praille-Acacias-Vernets, le PAV.
Du coup, la CPEG pourrait financer les retraites des salarié-e-s de l’Etat grâce à la mise sur le marché de logements à des prix accessibles pour la majorité de la population et non-spéculatifs.
L’intérêt de la chose est évident. L’adoption du PL 12228 ne serait pas seulement moins coûteux pour le contribuable : il permettrait de garantir nos retraites tout en soustrayant les terrains du PAV -qui appartiennent à la collectivité- à la voracité des promoteurs immobiliers !
Bon pour les un-e-s et les autres !
Les gagnant-e-s du coup ne seraient pas seulement parmi le personnel des services publics : c’est l’ensemble de celles et de ceux qui cherchent à se loger sans pour cela engraisser les spéculateurs!
Grâce à des loyers accessibles pour la majorité de la population.
Il est indispensable de rappeler à la nouvelle députation qu’elle aura entre ses mains la destinée de quelque 69'000 affilié-e-s à la CPEG et celle des dizaines de milliers de leurs proches qui seraient touchés par leurs décisions. La portée des décisions que le Grand Conseil est appelé à prendre est énorme.
C’est l’avenir de nos retraites, de notre salaire pour demain, que le Parlement tient dans ses mains : va-t-il l’assurer ou le jouer à la roulette russe ?