«Arrêtons le travail par milliers!»

Questions à Vincent Bircher, travailleur social et président du SSP – Région Genève.

Eric Roset

Pourquoi appelez-vous à la grève le 12 novembre?

Vincent Bircher – Au premier abord, les postes mis au budget paraissent conséquents. Mais c’est un trompe-l’œil: un tiers de ces postes sont incontournables, car liés à la pandémie et à la guerre en Ukraine. Pour le reste, il s'agit des postes qui n'ont pas été créés en 2022, faute de vote sur le budget. Cela ne sera pas suffisant. À l'Institution de maintien à domicile (Imad) par exemple, seuls quatre postes sont prévus alors que les besoins explosent!

L’enjeu principal se jouera cependant autour des salaires. Alors que les prix augmentent, notre employeur choisit de baisser les revenus du personnel: entre 200 et 400 francs de moins par mois – sans tenir compte de l'augmentation des primes d'assurance maladie. Chacun-e peut évaluer ses pertes grâce à l’outil que nous avons mis en ligne (www.combientuperds.ch)!

Le budget ne prévoit, en outre, aucune augmentation des minima sociaux.

Cet hiver, on peut donc craindre que certaines familles devront choisir entre allumer le chauffage ou acheter des biens de première nécessité. Dans un canton aussi riche que Genève, c'est au-delà de tout!

Cette décision s’inscrit dans une politique d’austérité appliquée depuis belle lurette…

Au cours des dernières années, les créations de postes ont été largement insuffisantes. C'est d'autant plus inacceptable que Genève compte une précarité importante et que les besoins pour y faire face sont élevés. Et ce, alors qu'une minorité de la population concentre une part délirante de la richesse. En 2021, la fortune des dix premiers résidents genevois se montait à 100 milliards de francs! Le Conseil d’Etat refuse de taxer ces super-riches, alors qu'un impôt provisoire de 0,5% permettrait de récupérer les 500 millions de déficit annoncés pour 2023!

Les moyens financiers existent. Mais pressé par la droite qui exige des baisses d’impôts supplémentaires, le gouvernement refuse d’y avoir recours. Et c’est la population qui en fait les frais.

Quel sera le rôle de l’assemblée générale du 4 octobre?

Le Cartel intersyndical a largement voté le préavis de grève. L'assemblée du personnel devra entériner ces décisions. Cette AG nous servira aussi à prendre le pouls de la mobilisation.

Il est important que toutes les organisations du personnel mobilisent largement pour cette échéance. Objectif: assurer la masse critique qui nous permettra d'évaluer les chances de créer un véritable rapport de force.

Que penser de l’argument financier brandi par le Conseil d’Etat?

J'ai déjà abordé la question des recettes fiscales. Pour justifier sa politique, le Conseil d'Etat évoque aussi la dette cantonale, proche des 12 milliards de francs,.

Or le taux d’endettement du canton est de 22%, ce qui est incroyablement faible en comparaison internationale. Le gouvernement peint donc le diable sur la muraille pour justifier ses attaques contre la fonction publique.

Pour résister, nous devrons arrêter le travail par milliers. Le 12 octobre, la fonction publique et les salarié-e-s des TPG feront grève ensemble. Le secteur de la construction débrayera les 7 et 8 novembre. L’automne pourrait être chaud.

La balle est donc dans le camp du gouvernement. C'est à lui de décider s’il veut faire face à un ras-le-bol social cet automne.