L’alliance de droite tient les rênes du Canton et démantèle méthodiquement les droits de la population. Elle favorise le business partout où elle le peut. Cette période rappelle l’ère monocolore du début des années 1990. La population continue d’en payer le prix. La droite avait alors fortement endetté le Canton. Cet endettement a depuis lors bien servi pour justifier le refus de répondre aux besoins de la population en matière de services publics et de sécurité sociale. Il n’a en revanche jamais freiné la droite dans ses projets de réductions d’impôts, au mieux linéaires, mais toujours à l’avantage des grandes fortunes et des personnes à gros revenus.
La droite attaque tous azimuts
Dans son viseur: la protection des locataires contre les congés-ventes, les instruments juridiques destinés à lutter contre la spéculation foncière, la protection contre les licenciements des salarié·e·s du secteur public, l’augmentation du temps de travail des enseignant·e·s, etc. La liste des référendums lancés notamment par les syndicats et l’ASLOCA ne fait que s’allonger. Au moment où ces lignes sont rédigées, le Grand Conseil débat de la énième loi destinée à supprimer la protection du parc locatif et des locataires contre les congés-ventes.
Pour la droite, les salarié·e·s du secteur public sont la principale variable d’ajustement budgétaire. Ainsi, le 22 septembre, les votant·e·s auront à se prononcer sur une baisse d’impôts en faveur des entreprises ainsi que sur la diminution de la durée et de la qualité de la formation des enseignant·e·s des écoles primaires.
Comme pour les dernières baisses d’impôts sur les entreprises (RIE 2, RIE 3, RFFA), la droite soutient ces mesures au nom de la prospérité et de l’emploi. Il n’est jamais question de taux de profit. Par essence, l’entrepreneur est selon ces partis uniquement intéressé par le bien-être du pays. C’est une sorte de héros des temps modernes.
À qui profitent ces mesures?
Ici et comme toujours, ce sont les PME qui sont mises en avant alors que les principaux bénéficiaires seront évidemment les grandes fortunes. Lorsque la droite prétend défendre les PME, il faut traduire ici par banquiers privés. La semaine dernière, M. Barro (patron d’une entreprise de fenêtres) expliquait en résumé à l’antenne de la RTS qu’en employant des salarié·e·s à Genève, il avait bien mérité du Canton et que cette baisse d’impôts avait en quelque sorte été durement gagnée. Il escamote les termes des rapports économiques: le travail de ses 65 salarié·e·s enrichit M. Barro qui sans cela ne les engagerait pas ou, s’il le faisait à perte, devrait sans aucun doute fermer son entreprise à brève échéance. Mais le plus important est que, derrière M. Barro, il y a surtout la poignée de contribuables – à peine plus d’une vingtaine – qui bénéficieront de la moitié de la baisse d’impôts et dont la fortune représente environ 200 millions de francs par personne.
Dégrader l'outil de travail
La droite adopte des accents ouvriéristes pour porter cette baisse d’impôts. Il s’agirait de protéger «l’outil de travail». De quoi s’agit-il? Du capital de l’entreprise qui n’est évidemment pas un outil de travail, mais un titre de propriété qui permet d’accaparer tout ou partie du bénéfice de l’entreprise. La droite tient un tout autre discours pour sabrer dans la formation des enseignant·e·s des écoles primaires. L’«outil de travail» des enseignant·e·s est leur formation ainsi que leurs capacités intellectuelles et pédagogiques. Et la visée de la droite en proposant une réduction de la durée de la formation des enseignant·e·s est tout simplement de dégrader cet outil de travail, pourtant essentiel à la population. Derrière l’hypocrisie de ces élu·e·s et des organisations patronales, un député UDC a laissé échapper la phrase qui exprime le fond de la pensée de celles et ceux qui défendent cette mesure: «Pas besoin d’un bachelor pour torcher des fesses.» Le corollaire de cette affirmation est que ce travail ne mérite pas un bon salaire, voire pas de salaire du tout.
Leurs priorités et les nôtres
Cette votation cristallise non seulement le sens des priorités de cette majorité, mais aussi le caractère réactionnaire de sa politique et de sa vision du monde. La formation pédagogique des maîtres·sses de l’enseignement primaire, tout comme celle des éducateurs·trices de la petite enfance, plonge ses racines dans une philosophie et une politique d’émancipation qui va de Rousseau à Piaget. Elle conçoit l’enfance comme un moment décisif pour le développement de l’être humain dans toutes ses potentialités. Les éructations du député UDC réduisent au contraire l’enfant à ses fonctions animales et assimile l’enseignant·e à un gardien de troupeaux.
Il est donc nécessaire d’opposer à la brutalité de cette politique, qui n’a d’intérêt que pour ce qui a une valeur marchande et ne respecte que celui ou celle qui possède, un projet de société fondé sur la protection de la dignité humaine, la solidarité et, plus généralement, sur l’émancipation de l’être humain. Pour aller dans ce sens, c’est un NON résolu qu’il convient d’opposer aux priorités de la droite qui gouverne ce canton!