Lettre ouverte d'une infirmière en colère

de: Gloria Castro, infirmière, membre SSP

Lettre ouverte à Monsieur de Senarclens d’une infirmière en colère.

Photo Igor Snider

Lors du journal télévisé sur Léman bleu du 7 octobre 2020, j’ai été consternée par l’intervention de Monsieur de Senarclens.

Celui-ci se déclare sidéré face au débrayage organisé le 15 octobre 2020 par le Cartel syndical de la fonction publique. Son argument majeur soutient que cette dernière n’est pas touchée par le chômage, bénéficie d’un salaire et un travail garantis et la caisse de pension ayant été largement recapitalisée. Il argue que cette grève est un manque de respect à l’égard du privé qu’il limite aux activités de la restauration, de l’hôtellerie et aux entrepreneurs et sans mentionner la population. Il répand enfin son écume sur la certitude que tout le monde doit faire des efforts face à la crise du COVID et au secteur privé, qui a été lourdement impacté.

Selon cette lumière du club des cent citoyens, en prenant la décision de se mobiliser, le Cartel monte le privé contre le public, il ponctue son plaidoyer de caniveau sur la certitude universelle que les fonctionnaires doivent faire des efforts.

Monsieur de Senarclens, où étiez vous pendant la crise ?! Avez vous assuré les soins auprès des patients malades à l’hôpital, pris en charge à domicile des patients en maintien à domicile, assuré la sécurité sur l’espace publique, partagé la lourdeur de l’enseignement dans nos écoles, rendu visite aux commerces de détails, encouragé les intervenants du nettoyage de l’espace public ou de l’enlèvement de nos ordures…. ?!

Le Cartel se mobilise non pas pour mettre en opposition le privé et le public ni pour protéger des acquis que vous fantasmez de la fonction publique. Les mesures que le Conseil d’Etat cherche à faire passer sous couvert de solidarité est une recherche délibérée de conflit social et une énième mise à mal des services au bénéfice de l’ensemble de la société que vos amis politiques et vous, contribuez à démanteler.

Je suis infirmière dans le secteur public et je vous assure que mes collègues et moi ne nous tournons pas les pouces. Avec un diplôme d’équivalence universitaire, les soignants ne sont pas considérés à leurs justes valeurs du point de vue salarial. Nous travaillons toutes et tous sous pression, en sous effectif endémique et depuis peu atteint dans notre santé au quotidien. La prise en charge des patients s’est complexifiée et devient de plus en plus lourde.

Le sous-effectif ne peut pas être combattu avec la pression d’en faire plus avec moins….. Le personnel soignant assure la sécurité des patients, leurs vies entre des mains qui risquent de plus en plus leur responsabilité juridique sans avoir le soutien attendu d’un bout à l’autre de sa hiérarchie.

Je trouve injuste et difficilement concevable que les services publics soient appelés à être plus solidaires qu’ils ne le sont déjà. Ce sont ces professeurs, ces soignants, la police, les transports publics… qui assurent déjà le fonctionnement indispensable à notre société.

Lorsque vous parlez du secteur privé, vous ne mentionnez que la restauration, l’hôtellerie et les entrepreneurs… et tous ceux qui ne rentrent pas dans vos fondements économiques et électifs ?! Tous ceux qui sont resté sur le bas côté de la route ?! Les oubliés, les sans-papiers, ceux qui travaillent au noir, les femmes qui font du travail dometique pour leur famille et toujours pas reconnues comme « rentable ou salariable »…

Non ce n’est pas à nous de faire un effort supplémentaire ! Car les services publics bénéficient à toutes et tous !

Mais je vous pose la question monsieur, quand il n’y aura plus de soignants, de profs, de policiers… car la perte de salaire « solidaire » prévue sera trop éloignée, que ferez vous ?! Engager des sans papiers jetable comme le pratiquent vos amis entrepreneurs libéraux?