Les droits et la santé du personnel du secteur de la santé doivent être préservés

de: Communiqué SSP Secteur Santé

Depuis maintenant plusieurs semaines, les personnels soignant et non-soignant œuvrant dans les structures genevoises de soins sont au front dans la lutte contre la pandémie de Covid-19. Alors qu’un élan public de solidarité et de sympathie à leur encontre a rapidement vu le jour, leurs conditions de travail ont pourtant été péjorées, leurs droits limités et leur santé mise en danger.

Photo Eric Roset

La résistance des personnels des structures genevoises de soins (HUG, imad, EMS) est depuis longtemps mise à rude épreuve : effectifs insuffisants et travail à flux tendu étaient déjà leur lot quotidien bien avant l’arrivée du nouveau coronavirus. Aux HUG, le manque d’effectif est consécutif aux plans de restructuration et d’économie mis en place ces dernières années. Dans les EMS, on paie le prix de la non-application de l’Initiative 125 ("Pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS") pourtant acceptée en votation par les Genevoises et les Genevois. Alors évidemment, les conséquences de ce déficit en personnel ont été accentuées par la crise. Pour la gérer, certains cadres ont mis entre parenthèse les droits les plus élémentaires des salarié.e.s "oubliant˟ que les lois, statuts et règlements du personnel étaient toujours en vigueur.

Conditions de travail péjorés et droits bafoués
Notre syndicat est fortement sollicité depuis le début de la crise. De nombreuses violations des règles en vigueur nous sont rapportées. Autant certaines mesures sont règlementaires – suppression des vacances -, autant d’autres ne le sont pas – instauration d’une forme de travail sur appel, changements d’horaire de travail sans consultation préalable (et donc sans tenir compte des obligations familiales), etc.

Aux soins intensifs et aux urgences adultes des HUG, deux secteurs particulièrement sollicités en ces temps de pandémie, un horaire de 12 heures de travail consécutif (soit des semaines à 60 heures) a été imposé au personnel. Dans la pratique, ces 12 heures peuvent se transformer souvent en 13 ou 14 heures, la relève peinant parfois à arriver à temps en raison de difficultés à passer la frontière. Imposer sans consultation un tel horaire dans des services intenses tant physiquement et intellectuellement qu’au niveau de la charge mentale met le personnel en danger d’épuisement précoce.

D’autres services des HUG souffrent d’une activité réduite et le personnel est renvoyé à la maison alors qu’il souhaiterait travailler. L’épuisement des uns contraste furieusement avec l’inoccupation involontaire des autres.

Santé et sécurité du personnel
La protection de la santé et la sécurité du personnel sont une obligation légale de l’employeur. Or, là aussi de nombreux manques nous sont rapportés.

L’absence de matériel adéquat et en suffisance (masques, surblouses) conduit de nombreux EMS à mettre à mal les bonnes pratiques professionnelles lors de soins à des résidents testés Covid-19 positif : partage de surblouse à usage unique, port de masque de type chirurgical prolongé au-delà de sa durée d’efficacité, absences de masques de type FFP2 lors de soins de proximité avec risque de projections et d’aérosolisation, etc.

Aux HUG, on a longtemps interdit aux nettoyeurs/euses qui pourtant travaillent dans tous les secteurs des soins de porter un masque. Quant aux brancardier/ères, ils et elles n’avaient qu’un équipement minimal pour transporter des patients testés Covid-19 positif.

Les distances de sécurité de 1,5 à 2 mètres préconisées par l’OFSP ne sont pas toujours respectées. Notre syndicat a dénoncé la semaine dernière la situation des aides de cuisines des HUG affectés à la chaîne de distribution réservée aux repas livrés à domicile par imad : le local est trop petit et ne permet pas de travailler en sécurité.

Les personnes dites vulnérables ou particulièrement à risques (soit celles qui souffrent d’une maladie comme l’hypertension artérielle, le diabète, les maladies cardio-vasculaires, les maladies chroniques des voies respiratoires, une faiblesse immunitaire due à une maladie ou une thérapie, ou le cancer) devraient pouvoir être réaffectées à un poste sans contact ou faire du télétravail et si cela n’est pas possible, être libérées de leur obligation de travailler. Or, ces personnes ont parfois de la peine à se faire reconnaître comme telles.

A imad, plusieurs salarié.e.s se sont plaint de se voir refuser une mise en quarantaine alors que leur conjoint.e. avait été testé.e Covid-19 positif. D’autres en arrêt maladie ont subi des pressions pour revenir au travail avant la reprise préconisée par le médecin traitant. Aux HUG, des salarié.e.s ressentant les symptômes du coronavirus ont dû, dans l’attente du résultat de leur frottis, retourner au front.

Les syndicats mis en quarantaine
Depuis le début de la crise, les directions ont coupé le contact avec les syndicats alors qu’en cette période hors normes il serait pourtant essentiel. Les courriers restent dans la plupart des cas lettres mortes ou n’obtiennent que des réponses lapidaires. Les HUG vont plus loin encore puisqu’ils menacent notre syndicat de plaintes pénales. Or, la liberté syndicale et le respect des droits n’ont pas été suspendus à cause de la crise du Covid-19.

Diminution des postes de travail aux HUG en 2021 ?
La direction des HUG aurait présenté aux départements médicaux un projet de budget 2021 à la baisse par rapport à 2020. Cela se traduira certainement par une diminution des postes de travail.
Si cette hypothèse se vérifie, elle serait particulièrement malvenue au regard de la situation actuelle. Pour rappel, notre syndicat réclame 500 postes de soignant.e.s en plus aux HUG. Il est temps que les politiques comprennent que la population genevoise a besoin d’un hôpital public avec des capacités à la hauteur des besoins sanitaires.

Revendications immédiates
Cette crise sanitaire met en lumière l’engagement des personnels soignant et non-soignants des structures de soins genevoises ainsi que les conditions de travail qui leur sont imposées.
Cette crise est certes majeure mais doit être gérée dans le respect des droits des salarié.e.s et des normes de sécurité. Tout doit être mis en œuvre pour préserver et protéger leur santé.

Les effectifs soignants déjà insuffisants en temps habituels doivent être renforcés dans les meilleurs délais.
La question d’un dépistage généralisé du Covid-19 dans les lieux de soin doit se poser.
Enfin, une compensation en temps et en argent doit être octoyée aux personnels des HUG, d’imad et des EMS pour l’effort exceptionnel fourni à la population genevoise durant cette crise sanitaire majeure.


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08.04.2020 Communiqué SSP - Les droits et la santé du personnel du secteur de la santé doivent être préservés PDF (446,2 kB)